Surfin' USA (1963)
Une collection de faces B
Réalisé en quelques séances éreintantes (on relève 16 prises pour « Stoked » et jusqu’à 39 pour « Noble Surfer » !), ce deuxième album des Beach Boys surprend : là où l’on attendrait une suite de Surfin’ Safari, on a un ensemble très hétéroclite, comme le sera 20/20 à la fin de la décennie. Entre deux tubes, « Surfin’ USA » et « Shut Down », on y trouve ce qui ressemble à une collection de faces B : plusieurs instrumentaux (5 sur 12 morceaux, ce qui en fait l’album le plus instrumental des BB !), une chute des sessions de Surfin’ Safari, « Lonely Sea », et, surtout, les premières tentatives de Brian dans ce registre lyrique et introspectif qui le conduira à Pet Sounds. Du coup, l’album est sensiblement différent de son prédécesseur et ceux qui ne supportent pas Mike Love seront ravis : il ne chante que 4 morceaux ! On a déjà évoqué ces deux tubes inaltérables que sont « Surfin’ USA » et « Shut Down » : toute la planète, océan ou pas, a repris le premier, lui-même « emprunté », pour la musique au « Sweet Little Sixteen » de Chuck Berry ; quant au second, il est tout aussi évident et marque le début de la collaboration de Brian avec Roger Christian. On aurait tort, cependant, de mésestimer le dernier titre de l’album, « Finders Keepers » qui, quoique mal placé dans le disque –la dernière plage est rarement la plus écoutée- offre déjà une structure très originale.
Une pierre blanche
Les instrumentaux, encore une fois, illustrent les origines musicales des BB : Rock ‘n’ Roll (« Honky Tonk ») et surf music (2 reprises du répertoire de Dick Dale, « Mirsilou » et « Let’s Go Trippin’ » ainsi que deux originaux, « Stoked » et la première composition de Carl, « Surf Jam »). Mais, ce sont deux thèmes, « Lonely Sea » et « Farmer’s Daughter » qui sont à marquer d’une pierre blanche : « Farmer’s Daughter » inaugure un style vocal qui sera perfectionné par la suite : Brian chante le lead soutenu et porté par les nappes vocales des autres Boys ; quant à « Lonely Sea », c’est tout simplement le premier morceau introspectif de Brian dont « Surfer Girl » et « In My Room » seront les continuateurs dès l’album suivant. Un petit clin d’œil, pour finir : les quelques accords de piano au début de « Lana » seront repris 30 ans plus tard par Brian pour « Desert Drive ».
Presse française
Rolling Stone n°118, octobre 2019, Chronique Surfin' USA (Alain Gouvrion)