Wake The World - The Friends Sessions (2018)
Depuis 2014, Capitol s’est mis à publier un choix des sessions de différents albums des Beach Boys. Tout a commencé en 2014 avec Keep An Eye On Summer, qui couvrait les années 1963-1964 et les albums All Summer Long et Today ! puis s’est poursuivi jusqu’en 2019 avec Sunshine Tomorrow, Sunshine Tomorrow 2 (Smiley Smile et Wild Honey) et , enfin, Wake The World et I Can Hear Music (20/20). Ont été publiés également des enregistrements Live : les deux concerts de Sacramento de 1964, le concert de Chicago en 1965, ceux du Michigan University de 1966 et la tournée de 1968. La plupart de ces publications n’ont hélas connu qu’une version digitale, à l’exception de Sunshine Tomorrow, qui a sans doute bénéficié de la première parution officielle en stéréo de Wild Honey. Il ne fait aucun doute que l’évolution du marché de la musique, désormais largement dématérialisée, ainsi que l’évidence d’une diffusion confidentielle d’éventuels albums physiques sont les causes de cette situation. On peut le regretter. Il n’empêche qu’est désormais à la portée des amateurs un ensemble de titres qui, sans être exhaustif, permet de passer de bonnes soirées. Il n’est pas inutile non plus d’avoir en un seul disque un choix des enregistrements de l’époque, plutôt que la répartition anarchique qui sévissait jusqu’alors sur de multiples bootlegs.
Sous le signe de la méditation transcendentale
Wake The World appartient à cette série d’albums digitaux et propose un choix des sessions d’un album presque confidentiel des Beach Boys : Friends. Curieux album, d’ailleurs, placé sous le signe de la méditation transcendantale, à laquelle tous les membres ont succombé, à l’exception de Bruce, ce qui explique sans doute le côté apaisé et languissant des titres (voir le n° 121 d’ESQ consacré à l’album), mais passé totalement inaperçu à sa sortie et qui n’a cessé au fil des années d’être réévalué jusqu’à devenir un des albums favoris des vrais amateurs. Je renvoie à la chronique de Fadi sur ce site pour de plus amples développements ainsi qu’au cd de Pascal Maupeu qui en propose une relecture acoustique que, personnellement, j’apprécie beaucoup.
32 titres
Wake The World propose donc 32 titres enregistrés entre 1966 (Child Is The Father Of The Man) et 1971 (Passing By avec piste vocale). Hormis ces deux titres, tout fut enregistré entre janvier et avril 1968. L’album est divisé en deux parties : la première, 18 titres, propose des versions alternatives, des backing tracks, des sessions des différents titres de Friends dans l’ordre de leur publication dans l’album. C’est le principe depuis Keep An Eye On Summer mais, dans ce cas, cela permet d’apprécier à sa juste valeur la richesse instrumentale de l’album, dans lequel Brian s’est totalement impliqué. Ses absences récurrentes deviendront beaucoup plus audibles à partir des sessions de 20/20 quelques mois plus tard. Parmi les surprises, il y a ce titre, le dernier de Friends : Transcendental Meditation, tant la musique semble éloignée des paroles et du thème* . On aurait attendu une musique douce, apaisante, relaxante, ce qui est le cas de la plupart des titres de l’album. Les sessions permettent d’écouter une première version de mars qui va dans ce sens. Mais, Brian, pour la version définitive, a choisi d’ajouter la section de anches qui donne à ce titre son allure martiale, en contradiction avec le thème. Pourquoi ? Bonne question, à laquelle je n’ai pas de réponse.
Les 12 titres suivants ont été enregistrés lors des sessions. Rien d’exceptionnel ici puisqu’il s’agit la plupart du temps d’essais ou de versions primitives de titres qui figureront dans l’album ou resteront inédits.
Les deux derniers titres échappent à ce regroupement chronologique. Child Is The Father Of The Man fut enregistré pendant les sessions de SMiLE et avait déjà été publié : on ne comprend pas très bien ce qu’il fait ici. Quant à la version de Passing By, la bande étant en très mauvais état, elle ne permet qu'une appréciation très relative de ce qu'elle aurait pu être. On est néanmoins très ému par l'interprétation de Brian, même si sa voix commence déjà à montrer de sérieux signes de faiblesse.
* Probyn Gregory fait le même constat (voir ESQ n°121, page 40)